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SORTIE DES LYONNAIS. 305 Fribourg me conduisit jusqu'à Roman Moulier dans son traîneau. Malgré mes précautions, mon nom fut connu dans le village et j'y reçus accueil de tout le monde et particuliè- rement du capitaine commandant les troupes de Berne ; j'allai voir M. le colonel Rolland, j'y fus reçu, dans sa famille, avec les témoignages les plus flatteurs de leur estime et de leur amitié. Je passai huit jours avec eux et ne cessai d'être comblé de leurs bontés. Je fis part a MM. Rolland et d'Ernest du projet que j'avais d'aller offrir mes services au roi de Sar- daigne et de lever un corps : ils m'approuvèrent beaucoup et me donnèrent des lettres de recommandation pour les chargés d'affaires de Turin et de Londres à Berne, et je partis pour cette dernière ville. J'avais conservé mon habit de maquignon, j'espérais n'être point reconnu en route. Étant à dîner à table d'hôte, à Lau- sanne, je vis M. Imbert, de Montbrison, je l'avais connu à lafindu Siège, il était aide-de-camp de M. Chapuis de Meau- béon, chef d'artillerie, et s'était conduit avec autant d'intelli- gence que de bravoure. Je ne voulais lui parler qu'après le dîner, mais il me reconnut à l'instant et me sauta au cou avec la plus grande-démonstration de joie:—C'est vous, général, me dit-il?—Oui, répondis-je, mais ne dites mol !—Je crai- gnais les espions de la Convention qui abondaient à Lausanne. Nous nous rejoignîmes l'après-dîner, il me proposa de m'ac- compagner à Berne, et j'acceptai bien volontiers son offre. Je rencontrai aussi M. Baillât, chirurgien-major de la Charité de Lyon, il avait été mon aide-de-camp au Siège et avait été blessé ; je l'aimais infiniment; il m'avait donné des preuves du plus sincère attachement et du plus grand courage. Il me reconnut dans la rue et se précipita dans mes bras. Ce mo- ment fut délicieux pour moi; je passai la soirée avec lui, nous nous livrâmes à tous les épanchements d'une joie bien vive, et le lendemain je partis pour Berne. 20