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SOUVENIRS DE 1 7 9 3 . 113 , J'allai ensuite me mettre sous la protection du citoyen 'Gauthier, que je connaissais dès l'époque de son mariage. La conversation roula bientôt sur le siège. Comment,lui dis-je, guerre de Français contre Françaisl ne peut-on pas s'entendre? n'y a-l-il aucun moyen de conciliation ? —- Nous avons fait tout ce que nous pouvions, répondjt-il ; nous avons envoyé le commissaire des guerres P***, on l'a repoussé.—Je le crois, vous avez envoyé un h o m m e inconnu, suspect, et qu'on a regardé comme un espion, un agent secret. 11 fallait envoyer un Lyonnais, un homme connu qui inspira la confiance.— Mais où le prendre ? Je crois fermement que Gauthier était de bonne foi, et aurait voulu un arrangement. Tout à coup, après quelques instants de silence, Gauthier me dit : voulez- vous y aller ? J'accepte : il fait rédiger un laissez-passer, le signe, va le faire signer à Dubois Crancé, et me le remet. Je pars à l'instant, accompagné par M. Salluon, jusqu'à l'extré- mité du faubourg Saint-Clair. De là , je marche seul, agitant en l'air un mouchoir blanc, en dépit de quelques coups de canons lyonnais, dont un boulet frappa à quinze ou vingt pas de moi un soldat portant un sac de terre. Le feu cesse, et j'arrive près de la barrière. Ce jour était un jeudi 5 septembre 1793. Près de la barrière, je trouvai le chemin coupé par un fossé large et profond, que je traversai sur une planche. J'exhibai mon laissez-passer. Mon nom était connu, et même ma per- sonne. On voulut me mener sans façon au poste de la bar-- rière placé dans la chapelle des Pénitents,place Saint-Clair. Je voulus et demandai qu'on me bandât les yeux, en observant qu'à la Pape il y avait des lunelles d'approche. Un bandeau, autour du front, on me mena au poste commandé par M. Burlin de la Rivière, ancien officier d'artillerie, qui me connaissait parfaitement. Si ma mémoire me sert bien, il m'accompagna lui-même à l'Hôtel -de-Ville. I! pouvait être midi. M. de Précy était en course pour visiter des postes, et ne rentra qu'entre une et deux heures. Je le vis et l'entretins seul assez long* 8