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350 LETTRES SUR LA SARDAIGNE. railles, roussies par les rayons d'un soleil éternel, marquées ça et la de taches rougeâlres, ressemblant à des glacis de terre de Sienne brûlée, et retenant suspendues, entre les jointures à e leurs pierres ébranlées, les grandes chevelures pendantes des plantes grasses, à fleurs violettes, et les lames hérissées des aloès gigantesques. Ces remparts qui sépa- rent le château d'avec la ville basse, sont couronnés en partie par des plantations de vernis du Japon, poivriers, acacias et arbres verts, formant au sommet de la ville une couronne de verdure : délicieuse promenade, dans une admi- rable position, et dont les Cagliaritains sont redevables à la sollicitude de leur vice-roi. Le faubourg de la marine, dont les maisons s'échelon- nent sur le versant de la colline qui regarde la mer, se com- pose d'un amas de petites rues sombres et rapides exhalant une odeur fétide, horrible mélange de poissons gâtés, de tan et de fromage. Aussi n'ai-je traversé ce faubourg qu'à la course, et c'est â peine si j'ai eu lé temps de jeter un coup d'œil sur les groupes de pêcheurs choisissant, assis en rond, les frutti di mare ; d'admirer les torses robustes et cuivrés des taneurs revêtus d'un costume analogue â celui de Léonidas aux Ther- mopiles, et de contempler les immenses caves pleines d'eau de mer dans laquelle baignent sans cesse des montagnes de fromages, spectacle dont les yeux et le nez sont également réjouis. Des observations trop prolongées dans cet intéressant quartier vous procureraient certainement une asphyxie com- plète ; c'est malheureux, car, au dire des Cagliaritains, dans ce pittoresque faubourg, on est à l'abri du choléra, de la peste et de la fièvre. Sur le versant méridional de la colline que couronne le château, s'étend le faubourg de Stampaza, vrai faubourg St- Honoré de Cagliari; les heureux habitants de ce quartier, rival de son haut et orgueilleux voisin, peuvent recommander