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                        VOYAGE A VIENNE.                    269

dans le monde romain, il eut l'insigne honneur de servir, d'un
côté, de limites à cet empire que rien ne semblait pouvoir li-
miter ! Voilà pour l'antiquité ; et aujourd'hui pour dernier
acte souverain, avant de tomber à la mer, il jette son bras
oriental entre l'empire russe et l'empire ottoman, s'interpo-
sant comme un puissant roi d'armes, entre ces grands rivaux.
   Ailleurs, il coulefièremententre Semlin et Belgrade, ayant
ainsi sur ses bords des clochers et des minarets, la croix et le
croissant, l'Autriche et la Turquie ; et quand ces états sont
en guerre, quand le canon d'Orient répond au canon d'Occi-
dent , il peut se faire entendre des deux rives en criant ,
comme dit le poète :

             « Trêve ! taisez-vous, les deux villes !


             Certes on peut parler de la sorte,
             Quand c'est au canon qu'on répond, •
             Quand des rois on baigne la porte,
             Lorsqu'on est DANUBE, et qu'on porte,
             Comme i'Euxin et l'Heilespont,
             De grands vaisseaux au triple pont ;


            Lorsqu'on ronge cent ponts de pierres,
             Qu'on traverse les huit Bavières,
             Qu'on reçoit soixante rivières,
             E t qu'on les dévore en fuyant ;
             Qu'on a, comme une mer, sa houle ;
             Quand sur le globe on se déroule
             Comme un serpent, et quand on coule
             De l'Occident à l'Orient !


   J'ai appelé la poésie a l'aide de mon humble prose pour dire
ce que c'est que ce prodigieux fleuve. Mais de môme que
la poésie a de grandes images, la guerre a souvent de gran-
des vues qui servent à l'accomplissement des vastes desseins
providentiels. Souvent, elle mène la civilisation par sa voie