Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
206                             DE LA FOI.

appelle le Monde, par opposition à ceux qui marchent, dans
la voie élevée.
    Aussitôt que l'homme a le cœur appauvri, c'est l'esprit
seul qui croît en lui. Dès la jeunesse il se produit un phéno-
 mène très grave, quand l'homme commence à sentir son or-
gueil, il se sort de sa raison pour se mettre tout entier dans
son intelligence. De là beaucoup de dialecticiens ou d'hom-
mes de talent, et peu d'hommes de génie. Ce n'est jamais
par l'intelligence qu'on arrive au génie.
    On appelle esprit cet usage qu'on fait de l'intelligence i n -
dépendamment de la raison. L'esprit n'a en vue que le rela-
tif; aussi entre-l-il de plus en plus dans celte voie, et l'ins-
tinct de sa perfection l'amène à ne plus s'occuper que de
petites choses. Conduit de la sorte aussi loin des principes
qu'il l'est du sérieux, il en vient, par le fait, à méconnaître
tout de bon ce qui est digne d'admiration ou de respect, enfin
tout ce dont il s'éloigne ; jusqu'à ce qu'il touche a ce terme
extrême, merveille lui-même en face de l'immense merveille,
de ne se sentir plus dans la pensée d'autre trait que le rire.
C'est là ce qu'on appelle le bel-esprit.
   Comme on le voit, le bel-esprit est exactement l'opposé
de la Foi, laquelle au contraire se tient pressée contre les
principes sans s'écarter trop dans les sentiers de l'intelligence.
El même, les hommes qui se sont rejetés exclusivement du
côté de la Foi, ont été accusés de manquer d'intelligence,
comme les autres, de manquer de principe. Ceux qui man-
quent de principe finissent par être des hommes de peu dans
l'action, et dans les devoirs sérieux de la vie.
   Par suite du vice de sa naissance, l'esprit ne larde pas à
voir sur lui les ridicules de la sottise, dont il n'est, au reste,
que le côté saillant. Mais l'esprit esl ordinairement irrémé-
diable, parce qu'il perdit la naïveté (l). Habitués à effacer leur
  (i) L'esprit, qui se chargeait de tout imiter (car c'est là le fond de toutes