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124 VOYAGE A VIENNE. somptueuses demeures qui forment la plus grande partie d'une belle rue, et qui appartiennent à un Ordre religieux, qui n'est sans doute pas mendiant. Les églises pourtant sont peu pourvues de ces trésors a r - tistiques qui les font ressembler à des musées en Italie. J'ai admiré toutefois, dans l'église du couvent des Auguslins, une œuvre capitale où Canova a mis toute la grâce et toute la no- blesse de son talent. C'est un superbe mausolée que le duc Albert de Saxe-Teschen consacra à la mémoire de l'archidu- chesse Marie-Christine, sa femme. Ce monument, cher aux artistes, visité de tous les étrangers, excite de douloureuses sympathies. Jamais le grand artiste ne fut mieux inspiré. Dans une chapelle voisine, une curiosité inattendue est offerte aux voyageurs. On vous fait approcher d'une porte en fer, semblable à la porte d'un coffre-fort, vers le milieu de laquelle on n'aperçoit pas tout d'abord une perforation qui fait ensuite l'effet d'un trou de lumière. L'œil appliqué contre cette imperceptible ouverture découvre, dans l'intérieur d'un cabinet d'aspect sépulcral, des boîtes d'argent ou de petites urnes fort simples, quelques-unes surmontées d'une croix. Elles sont très soigneusement étiquetées, et contiennent les cœurs des empereurs d'Autriche, moins, dit-on, celui de Joseph H, dans le cadavre duquel on ne voulut point fouiller, de peur, selon un bruit du temps répandu parmi le peuple, d'y trouver des traces de poison jésuitique : — Ils en ont mis partout ! Dans cette lugubre collection de cœurs impériaux, le der- nier qui a cessé de battre, et le premier que l'œil rencontre, est celui de l'empereur François, cœur honnôle, qui fut grandement affligé de Dieu et des hommes ! 11 serait curieux de faire des études sur de pareils sujets ! Qui sait s'il y aurait une différence visible entre le grand cœur de Marie-Thérèse et le cœur de tel obscur Rodolphe ou Sigismond ? Qui sait