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Adeline, la jeune mariée, est une charmante création. Jolie,
modeste, et tendrement attachée à Edouard Murville auquel
elle vient d'être unie, Adeline fait un mariage qui est à la
fois d'inclination et de convenance. Elle a une belle dot,
et son mari possède une bonne place dans une adminis-
tration publique. Edouard n'a jamais eu qu'un frère au
préjudice duquel il a toujours obtenu la bienveillance et
la tendresse de sa famille. Le caractère de ces deux frères,
alors qu'ils étaient enfants, était complètement dissemblable.
Edouard était tranquille, rangé, prudent, mais d'une faible ca-
pacité ; Jacques, tel est le nom de son frère, était bruyant,
paresseux, ardent, mais plein d'esprit et de courage. Dégoûté
du séjour de la maison paternelle dans laquelle ses affections
les plus douces étaient froissées et méconnues, Jacques s'en
est éloigné à quinze ans, et, depuis lors, on n'a plus entendu
parler de lui.
   Madame Germeuil, mère d'Adeline, a décidé sa fille à pré-
férer Edouard Murville à d'autres partis plus séduisants « Ce
jeune homme, pensail-elle, rendra ma fille heureuse. Il
n'a pas une grande force de caractère ; mais qu'importe ?
ma chère enfant sera maîtresse chez elle, et les ménages
gouvernés parles femmes sont souvent les mieux conduits »
   Au milieu de la réunion nombreuse et gaie qui célèbre la
noce, un personnage attire plus l'attention que les autres.
Ce personnage est introduit en scène en peu de mots, avec
cet art facile qui dislingue l'auteur ; mais on comprend de
suite qu'il est appelé à jouer un rôle important dans celte
histoire. Dufresne, tel est son nom, est âgé de trente-huit à
quarante ans; la régularité de ses traits est agréable, mais ils
ont une expression équivoque et sinistre qui grimace la bien-
veillance et repousse la confiance et l'estime. Il est frappé
de la beauté de la jeune mariée ; et dès ce moment, en hom-
me habitué à mettre de côté tous les scrupules, il forme con-
tre le bonheur qui semble réservé au jeune couple les plus
odieux et les plus criminels desseins.