Revue du Lyonnais » série 1 - n°13 ( 1841 ) » pp.408

                             408
   Clapé avaitéchappé aux rigueurs inquisitoriales def ancien
archevêque de Montazet dont la première tournée fut une
razzia complète de toutes ces images difformes. Par suite il y
eut, à ce que rapporte l'histoire, au grand déplaisir de nos
dévotes, dans la cour même du palais de Saint-Jean, un ma-
gnifique auto da fê de tous ces saints de bois du diocèse, qui,
par leur laideur, expièrent ainsi la faute de leur père. Sans
doute pour Clapé, on jugea que le fils ne devait pas souffrir
héréditairement.
   Mais ce qui apaisera le peuple, c'est que le peuple sait
que Clapé n'a pas fait mauvaise fin, qu'il n'a quitté l'église
que sous la protection de la Charte, et qu'il n'arrivera jamais
rien de désagréable à Clapé. On le soignera, il en est sûr, à
cause de ses vieux services.
   Aussi, cette population religieuse se résigne-t-elle à cette
disparition, à ce brusque enlèvement de Clapé, en récitant
les paroles du psaume :
        Je me suis tu, seigneur, parce que c'est vous qui l'avez fait.
   De toutes ces choses, il va donc arriver que désormais Clapé
vivra en paix dans les greniers de la cure. Il sera mort au
monde, sans doute, mais qui bene latuit bene vixit. Et sem-
blable à ces fonctionnaires dont on s'est assez servi, de saint
de bois en activité, il tombera dans la catégorie, lui aussi, des
honoraires. Ou bien ce sera Moncey aux Invalides, Mgr de
Pins aux Chartreux, Charles Quint dans un cloître.
   Une fois là, c'est-à-dire aussitôt que l'existence de l'homme
qui a fait parler de lui est arrivée à cette période d'inutilité,
il faut plier bagage, penser à l'autre monde. L'affection du
peuple, qui toujours descend, ne remonte plus à cet être qui
décline. Et l'égoïste histoire qui ne trouve pas son compte
auprès de telles gens, leur ferme impitoyablement son livre.
Aussi tous les légendaires arrêtent-ils là l'histoire de Clapé.
                                              A. COUTURIER.