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2S7 mystérieux foyer qui verse autour de lui de si divins rayons ? Pardonnez-moi, MM., de faire passer une lourde analyse sur ce qu'il y a dans l'âme de plus suave et de plus délicat. Il faut bien se résoudre à déchirer une fleur, pour en étudier la structure. Les objets réels qui existent dans le monde s'offrent à nous avec un mélange de beautés et de défauts. Ils existent, donc ils sont beaux : ils sont finis, donc ils sont imparfaits. Car le beau comme le vrai n'est autre chose que l'ETRE. Le néant n'a aucune beauté : la laideur n'est qu'une litnile ^ un manque d'être, d'unité > d'harmonie. L'instinct infaillible des peuples l'a bien senli; les langues en sont la preuve. Le mot défaut, synonyme de laideur, vient d'un mot latin qui signifie manquer. Le mot perfection, synonyme de beauté vient d'un mot qui veut dire achever, compléter. La beauté est donc une plus grande plénitude d'être ; plus un objet est, plus aussi il est beau. Or, tous les objets que la nature présente à nos sens pos- sèdent dans une proportion limitée l'être, la perfection, la beauté (toutes ces expressions sont synonymes). Cette proportion limitée ne peut suffire au cœur de l'homme. Né pour l'infini, pour le parfait, il l'appelle sans cesse, il le demande au monde entier: et quand il a, sans s'assouvir, épuisé le r é e l , son imagination se jetle dans le possible, s'élance vers un bien que l'œil de l'homme n'a jamais vu ; elle lâche de l'alleindre, de le saisir, et quand ses efforts sont inutiles elle revient sur la terre, triste, découragée. Gomme un aigle lassé qui retombe des cieux. Alors vient l'artiste, le poète. Il s'élève jusqu'à cet idéal du beau qui flottait nuageux et indécis à l'horizon de notre intel- ligence, il le saisit de sa puissante main, le comprime, le cristallise, en fait un ouvrage solide, visible aux yeux des autres hommes. Dans les objets qui l'environnent, il saisit le plan qui a présidé à leur formation, il découvre la loi dont