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 Ta sienne? La partie impersonnelle du cœur, à laquelle nous
 avons laissé ce nom pour la distinguer de la volonté, serait-
 elle moins certaine que la partie impersonnelle de la raison,
 à laquelle nous avons laissé le nom de rationnalité, pour la
 distinguer de l'intelligence? Si, comme le rayon de lumière
 qui s'adresse à la raison, le sentiment d'amour qui s'adresse
 au cœur, vient de Dieu, ne sont-ils pas l'un et l'autre aussi
 divins, c'est-à-dire aussi infaillibles comme révélation de
 l'être qui se manifeste à nous par leur moyen ? Devons-nous
 croire que Dieu traite moins bien le cœur, qui doit le posséder,
 que la raison, qui ne doit que le connaître; qu'enfin il traite
 moins bien notre cœur, qui est le but de la raison, que la
 raison, qui est un moyen donné à notre cœur?
    Mad. de Staël dit qu'en Allemagne les philosophes regar-
dent le sentiment comme le fait primitif, le fait fondamental
de l'ame; et la raison, comme destinée seulement à recher-
cher la signification de ce fait. Je crois qu'en retranchant de
cette proposition ce qui pourrait s'y trouver d'exclusif, il faut
entrer dans ces vues. Maintenant donc qu'on a interprété la
voix de la raison, il reste à interpréter la voix qui parle dans
le cœur. Eh! quelle langue peut se faire entendre dans
notre nature impersonnelle, que celle que Dieu lui-même y
parle ? Or, quelle autre bouche saurait mieux nous entretenir
de lui ?
    Ici cependant une chose me surprend : Pourquoi le cœur
a-t-il quelque chose de plus intime que la raison ? d'où vient
que l'on est toujours prêt à ouvrir sa raison, tandis qu'on ne
peut se résoudre à ouvrir son cœur si l'on ne voit autour de
soi des oreilles discrètes et de la sympathie? Ah ! c'est que
réellement je crois que le cœur doit nous révéler sur Dieu
quelque chose de plus intime. Le cœur, par nature, est tout
craintif; on dirait qu'il éprouve une espèce de pudeur à
parler de ce qui lui semble devoir rester dans le mystère.