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qu'elle fut livrée aux ongles du peuple sur la petite montagne
du Fay que l'on voit en face de là. On y renferme un chat qui
représente la châtelaine. À un signal donné, toute la jeunesse
du pays se rue sur la prison, la brise, elle est dure, mais c'est
au plusfort ! la cage brisée, on s'empare du chat,et tout vivant,
on se le déchire, on lutte pour les plus petits morceaux qui res-
tent de cet emblème exécré. Cette jeunesse excitée, prise de
vin, y va avec une frénésie, une rage à faire croire que cette
haine date d'hier, et que c'est moins le simulacre que le
monstre vivant dont le peuple furieux se dispute pièce à pièce
les chairs palpitantes!
   Or, cette jeunesse est sans égard, sans pitié. On dirait que
le sang enivre, et que la main qui en est une fois teinte en
veut toujours. Ce chat finit trop vite au gré de ce peuple
 exalté, et pour faire durer celte scène sauvage, il se jette en-
 suite sur les premiers animaux qu'il rencontre. On fouille
après les égoûts, on y recherche les ordures dont on couvre
 les passants, et les passants pour de telles insultes n'ont pas
le droit d3 se plaindre; de préférence on s'attache même aux
fraîches toilettes, aux plus jeunes filles, aux dames parées, h
de beaux cavaliers !
   Le peuple est libre, il s'amuse, il se venge, à cette fête ! « A
mon tour se dit-il. » Cette joie effraye; les règlements muni-
cipaux n'y feraient rien. Un maire se serait exposé au sort de
la dame de Jarez, s'il avait entrepris de lutter contre cette
vieille coutume, contre ce divertissement dont la barbarie se
trouve motivée par cette tradition de haine et de justice p o -
pulaire, qui cependant depuis 1830 paraît s'humaniser.
   Enfin, voilà tout ce que le populaire rapporte d e l à châte-
laine du Jarez. Quelques chroniqueurs y mêlent aussi la subs-
titution frauduleuse des cochons de lait aux petits enfants, qui
déjà figure au conte de la Belle au bois dormant, mais cet épi-
sode qui date de Saturne dont on trompa aussi la voracité par
un autre genre de substitution a, mal à propos, fait invasion
dans la chronique du Jarez ; aussi l'en élague-ton. En somme,