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           BULLETIN MUSICAL ET DRAMATIQUE.

TûALBERG.— NORMA.—MASSOL.— M 1 ! c JULLIENNE.— M . ET
  Mmc TAIGKY.—CONCERTS DE MM. BAUMANN, CHERBLANC,
  DAYET ET JANSENNE.
   Tous les journaux, grands et petits, o n t , depuis un m o i s , publié les
plus magnifiques dithyrambes en l'honneur de Thalberg. Tout est bien jus-
que-là, et nous nous associons de grand cœur à cet épanouissement universel
de la satisfaction publique, mais cela nous embarrasse fort, car, toutes les for-
mules de l'éloge étant à peu près épuisées à l'heure qu'il est vis-à-vis du grand
pianiste, nous sommes forcé de servir en quelque sorte d'écho à tous les
organes, plus ou moins officiels, de la presse lyonnaise. Le seul moyen, pour
nous, de sortir d'un embarras aussi fâcheux, sera de nous abstenir de toute
appréciation du talent si connu de cet artiste, d'autant plus merveilleux qu'il
cherche moins à le paraître. Nous ne dirons donc rien de cette magnifique
simplicité, de celte largeur, de ce tact exquis et tout français, de ce choix si
admirable, entre ce qu'il faut admettre et ce qu'il convient d'écarter ; assez
d'autres, avant nous, ont étendu ce thème si fécond, et l'ont varié à l'infini ;
nous nous bornerons simplement à constater l'éclatant triomphe obtenu chaque
soir par M. Thalberg, dans la fantaisie sur les motifs de la Muette, et dans
celle qui a pour texte principal, un thème de Beethoven. Les pianistes de
tout âge et de tout rang, qui se sont succédés aux quatre concerts donnés dans
la salle du Grand-Théâtre, et qui peuvent connaître mieux que personne les
ressources de l'instrument et ses difficultés prodigieuses, ont dû être singuliè-
rement émerveillés de l'exécution de Thalberg, surtout dans les morceaux que
nous citons. Nous avouons pour notre compte en avoir été effrayé, et désor-
mais, quoiqu'on nous dise, quoique nous puissions entendre sur le piano, plus
rien ne nous étonnera.
      La récente reprise de la Norma, a été, pour M m 0 Julian, l'occasion d'un
 beau succès. Dans le rôle de la grande prêtresse, cette cantatrice, qui nous
 avait révélé, dans Odette de Charles VI, de précieuses qualités de force et
 d'éclat, n'a point faibli devant la grandeur d'une tâche que peu d'artistes, en
 province, seraient aujourd'hui en mesure d ' a b o r d e r ; elle s'est vaillamment
 comportée sous la couronne druidique, et les longs voiles flottants de la pré-
 tresse d'Irminsul, et elle a courageusement mené à bonne fin la fatiguante en-
 treprise de chanter le rôle de la Norma, pour lequel l'exhubérante énergie de
 la Malihran et la vigueur toute antique de Julia Grisi n'étaient point de
 t r o p . Poitevin a tenu convenablement sa partie dans le personnage d'Orovèse.
 Mais, pour Dieu, qu'on ne nous demande pas compte du reste.
      L'administration des théâtres, soigneuse, avec juste raison, d'apporter quel-
 que variété dans la composition un peu uniforme de ses spectacles, a traité
pour quelques représentations avec M. Massol. Cet artiste, que l'Académie
 Royale de Musique n'a pas été assez habile pour conserver, s'est déjà fait
 entendre dans le rôle d'Aslhon de Lucie, et dans celui d'Abayaldos de Dom
Sébastien. La voix de M. Massol, étrange, et en quelque sorte exceptionnelle,
est une sorte de baryton, peu fécond en notes graves, mais qui atteint faci-
lement el sans effort aux notes même élevées du registre de ténor ; cette
 disposition naturelle, jointe à la qualité du timbre, qui est riche, vibrant et
sonore comme une bouche d'airain, a permis à M . Massol de donner à cer-
taines phrases du grand duo de Lucie et d'Aslhon, et à tout le rôle d'Abayal-
dos une valeur et une signification, que notre public de province ne lui soup-
çonnait pas. Il a chanté également, avec un éclat merveilleux et une manière