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MADEMOISELLE DE MAGLAND. 495
croyait ! Et rien ne l'avait préparéo au coup fatal ; cet homme au-
quel elle avait élevé un autel dans son cœur, comme à un Dieu vé-
néré, n'est plus qu'une idole d'argile, qui en tombant l'a écrasée
dans sa chute. Sa première croyance terrestre n'existe plus. Cette
enfant qui n'a encore entrevu la vie qu'Ã travers les songes d'une
imagination enchantée s'était promis des affections éternelles ; elle
s'était dit sans doute que les amours commencés sur cette terre
allaient se continuer au ciel ; elle s'était créée une noble et sainte
image, figure toute idéale, à laquelle elle avait attribué innocem-
ment toutes les perfections qu'elle avait rêvées; elle aimait dans
Raou! cette créature imaginaire ; juge des tortures de ce cœur
jeune et candide ! Aucun ne fut jamais plus cruellement frappé.
Il lui est impossible de s'abuser elle-même, toutes ses illusions
sont détruites et ravagées de fond en comble. Elle se croit sacrifiée
à la cupidité de Raoul ; moi, je soupçonne dans sa conduite un mys-
tère moins ignoble; mais peut-être paraîtrait-il, aux yeux de Marie,
plus coupable encore.
Raoul s'est présenté plusieurs fois au Pré-de-Vert pendant la ma-
ladie de Marie, mais il n'a pas été reçu. Il est allé me chercher à Rolle
sans succès, car je ne quitte guère tous ces chers affligés ; je crois,
au reste, que,dans l'intérêt de tous deux, il vaut mieux ne pas nous
voir ; certes, je ne suis pas querelleur, mais il me prend parfois de
terribles envies de lui demander raison de toutes les douleurs dont
il est cause.
Aussitôt que Marie sera en état de supporter le voyage , son
oncle l'emmènera en Provence ; alors seulement je quitterai la
Suisse; jusque-là , adieu.
Auguste de BLOSSAC.
XI.
Deux mois s'étaient écoulés depuis le mariage de Raoul, et Marie
était encore en proie à de vives douleurs. Ses jours étaient sans
repos, et ses nuits sans sommeil: quand parfois, domptée parla