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                  DE LA PHILOSOPHIE FRANÇAISE.             463

l'idée ou le courage leur avait manqué pour en étendre plusloin
les applications dans le domaine de l'organisation sociale et
politique ; telle fut la mission accomplie d'une manière écla-
tante par les philosophes du XVIIIe siècle. Je sais qu'ici je
vais contre les idées reçues, et je m'attends à des réclama-
tions. Quoi! dira-t-on, les philosophes du XVIIIe siècle ne
sont-ils donc pas unanimes à rejeter les idées innées, les idées
naturelles, absolues, à proclamer que toutes les idées, sans
exception, viennent des sens, et en conséquence à nier la
raison universelle et toutes les vérités universelles et néces-
saires, soit pour la spéculation, soit pour la pratique? Il est
vrai que cette négation est implicitement contenue dans la
fausse hypothèse sur l'origine de nos connaissances, aveuglé-
ment adoptée et opiniâtrement défendue par les philosophes
de cette période. C'est en quoi consiste leur erreur, et cette
erreur a été trop souvent et trop bien démontrée pour qu'il
soit besoin d'y insister. Mais s'ils nient théoriquement et la
raison universelle et les principes absolus, en revanche ils les
admettent explicitement dans la pratique quand il s'agit de
morale, de justice et de politique. Partout on dit et on répète
que Voltaire est un disciple aveugle de Locke et de la philo-
sophie de la sensation; cela n^est vrai qu'avec une énorme
restriction. En effet, Voltaire admet une raison universelle,
la même chez tous les hommes de tous les temps et de tous
les lieux. II va plus loin, il considère cette raison comme une
émanation de l'Être suprême (1), tout de même que Malebran-
cheouFénelon. Cette raison, dit-il encore (2), enseigne à tous
les hommes qu'il y a un Dieu, et qu'il faut être juste. Avec au-
tant d'éloquence, avec les mêmes arguments que l'auteur du
Traité de l'existence de Dieu, il soutient l'existence d'une mo-

  (i) Ed k. VI e vol., p. 65. Tout en Dieu.
  (2) Und., pag. 39.