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MÉMOIRE SUR L ' A T I A N T I D E . 275 devoir vous raconter, afin de condescendre au désir de So- crate, afin aussi d'honorer la déesse dont on célèbre aujour- d'hui le triomphe (Minerve), par ce récit qui sera comme un hymne consacré à son triomphe. « C'est bien, dit Socrate ; mais dis-nous ce que ton aïeul t'a raconté de l'histoire antique de notre patrie, d'après le récit de Solon, el ces événements que celui-ci n'a pas jugé à propos de nous transmettre par écrit? « Je vais vous faire connaître, répond Crilias, celte an- cienne histoire que mon aïeul m'a racontée dans mon enfance. Il avait environ quatre-vingt-dix ans ; j'en avais dix-huit, au plus, lorsque dans un jour solennel auquel on assemblait les jeunes gens pour chanter des hymnes en l'honneur des dieux, je me trouvai réuni avec les enfants de nos amis et de nos proches, el nos parents nous engagèrent à essayer nos voix, y afin qu'on pût juger lequel de nous, dans le chant de ces hymnes sacrés, aurait le prix et développerait la voix la plus harmonieuse. On chanta les vers de plusieurs poètes, et en particulier ceux de Solon furent chantés par quelques Mns d'entre nous qui admiraient les charmes de sa poésie. Alors quelqu'un de notre tribu (l) se mit à dire, soit qu'il le.jugeât ainsi, soit qu'il voulût flatter mon aïeul, qu'il lui paraissait que Solon, si grand législateur et si grand philosophe^était en outre un excellent poète. Je me souviens fort bien quô.ces paroles réjouirent grandement le bon vieillard, et qu'il dit en riant: O Anymander (c'était le nom de l'auteur de'\Ja réflexion), si Solon ne s'était pas occupé de la poésie seule- ment comme d'un passe-temps agréable, et s'il s'était donné à elle comme tant d'autres, sérieusement et tout entier, s'il avait terminé l'histoire qu'il avait entreprise à son retour (r) On sait qu'Athènes et l'Attique étaient divisées en dix tribus, et chaque citoyen devait être inscrit en l'une de ces dix tribus.