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MADEMOISELLE DE MAGLAND. 261 à peine les honneurs funèbres étaient-ils rendus à M. de Magland, qu'elle a quitté le Genêt, et s'est retirée dans une maison reli- gieuse du pays de Gex. Sa douleur qui s'est d'abord manifestée avec éclat, ne lui a point fait oublier le chapitre de ses intérêts, car les scellés sont déjà posés partout. Il paraîtrait, d'après ce que m'ont dit les gens de loi, que M. de Magland était un de ces riches mal aisés, dont le train de maison et les habitudes de tous les jours, vont au delà de leurs revenus : pour les augmenter, il avait mis la presque totalité de sa fortune dans ces spéculations chanceu- ses, avec lesquelles les intrigants habiles tentent ceux qui se trou- vent dans cette triste situation. Il avait appris, peu de temps avant sa mort, que celui qui possédait sa confiance en avait non seule ment abusé, pour le ruiner, mais que sa signature, ayant servi à tromper des gens crédules et de bonne foi, l'houneur de son nom se trouvait gravement compromis, si à l'instant une somme consi- dérable n'apaisait une plainte qu'ils étaient prêts à porter contre lui. La dot de sa fille était sa seule ressource, le reste de ses biens suffisant à peine à couvrir la fortune de sa nièce ; il fut bien- tôt décidé, la dot fut donnée. Il est probable que ce coup imprévu a accéléré l'instant de sa mort. Marie ignore encore tous ces détails, elle ne quitte pas son appartement ; je n'ai point encore osé m'y présenter. Raoul reste enfermé chez lui ; depuis quelques temps, son humeur est sombre et bizarre ; il est triste, presque boudeur, et sûrement, il me fuit, car il m'a été impossible de le rencontrer seul, depuis plus de quinze jours. Heureusement, on attend la famille O'Kennely, ce sera une grande consolation pour Marie. Je vais rester ici tout le temps que je pourrai être utile à ce bon M. de Malvignane, dans le dédale d'ennuyeuses affaires où il va être plongé. Quand tu reviendras d'Italie, j'irai te rejoindre à Paris. Le mariage de Raoul est maintenant retardé jusqu'à la tin du deuil de Marie, j'aurai tout le temps de revenir ici. Adieu, tout à toi. (La suite au-prochainnuméro).