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150               MADEMOISELLE DE MAGLAND.
ment votre tâche ; c'est à vous de lui montrer que les femmes qui
n'osent pas permettre un jugement à leur esprit, ni un désir à leur
cœur, ne valent pas mieux que celles qui ne veulent abdiquer ni
l'un, ni l'autre. Il faut lui prouver qu'elles ne sont ni moins sou-
mises à leurs devoirs de femmes, ni moins dévouées à ceux qu'elles
aiment, pour laisser à leur raison le droit de décider entre le
bien et le mal, sans en appeler à l'opinion publique, qui juge sui-
des données toutes faites et se trompe presque toujours.
   Me pardonnerez-vous si j'essaye d'excuser auprès de vous l'exa-
gération des préjugés de Mme de la Rochemarqué, quoiqu'ils vous af-
fligent? une mère sent vivement la douleur de n'être plus qu'en se-
cond dans le cœur de son fils, ou le chagrin de n'y être plus seule.
Si vous saviez que la tendresse maternelle n'a ni règle, ni frein,
qu'elle s'alarme de tout, vous comprendriez que les craintes qu'é-
prouve Mme de la Rochemarqué, pour l'avenir de son fils, tiennent
bien plus peut-être à son amour pour lui, qu'à son inimitié pour
vous. Je crois donc que, sans porter la moindre atteinte à la noble
franchise de votre caractère, vous pourrez l'amener à vous rendre
plus de justice. Pour vous aidera y parvenir, perroettez-moi de
vous faire part d'un soupçon que j'avais depuis longtemps, et qui
acquiert aujourd'hui toutes les apparences de la certitude. Je vous
ai dit un jour que je ne croyais pas votre cousine franche et
vraie dans ses démonstrations de tendresse vis-à-vis de vous, au-
jourd'hui je crois pouvoir vous affirmer qu'elle cherche à vous
nuire dans l'esprit de la mère de Raoul; c'est sur des riens peut-
être que je fonde mon accusation, mais ce sont précisément ces
riens qu'elle néglige de dissimuler, qui forment pour moi une masse
de preuves positives. Examinez ses soins empressés pour Mme de
la Rochemarqué, son affectalion à ramener toujours la conversation
sur des sujets où elle sait que vous n'êtes pas d'accord avec elle ;
l'adresse avec laquelle elle force pour ainsi dire les évènemenls
qui peuvent vous montrer à Mm« de la Rochemarqué sous l'as-
pect le moins favorable ; je me suis aperçue souvent qu'elle cher-
che à lui plaire plus qu'il n'est nécessaire, et je crains que le
premier moyen dont elle se soit servie ait été celui de la calomnie.
Toute sotte qu'elle est, Alix sent sa nullité, et elle en souffre, ou,