Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
472                   DU BIEN DANS L'ABSOLU

phes n'ont cherché dans la matière le principe effectif du mal
que parce que la matière est en effet le moyen et la condition
de toute individualité finie. Ainsi le mal dérive des nécessités
même de la création; et comme on a dit : la loi du bien, on
peut dire en un sens très vrai : la loi du mal. L'imperfection
de la volonté, conséquence de la limitation essentielle de
l'être créé, rend inévitable l'existence effective du mal! Dans
la création, le ma! n'est que le caractère même qui lui est es-
sentiel d'être actuellement finie et la condition radicale de son
existence. 11 n'y a donc point de déchéance. La déchéance,
c'est la création (1). »
   Si le mal était dans le fait môme de la création, c'est Dieu
qui aurait créé le mal. Si la création est un mal parce qu'elle
est essentiellement finie, quoique gravitant sans cesse vers le
terme de l'infini, terme qu'elle n'atteindra jamais ; par l'opé-
ration même de Dieu le mal durerait sans cesse, et le bien
serait un terme qu'on n'atteindrait jamais. Ces conséquences
toutes fausses n'ont pu résulter que d'une métaphysique
biaisée.
    Dans quelque lieu que l'on pose la question, dans l'absolu
ou dans le temps, le bien c'est la possession de l'être. Le bien
infini, c'est la possession de l'existence infinie ; le bien tem-
porel c'est la possession de l'existence temporelle. Le mal c'est
la privation de l'être, c'est ce qui fait rentrer vers le néant.
Le mal, ce n'est pas la limitation de l'être, mais la diminu-
tion de l'être. Autrement, l'ensemble des êtres créés serait l'en-
semble des maux, et Dieu serait la source de tous les maux.
  De même que tout accroissement de l'être est un bien,
toute diminution de l'être est un mal. L'être éprouve
un bien à mesure qu'il sent son existence se développer, et


  (i) M. DE LA MEKNAIS, Esquisse d'une philosophie, De l'homme, liv. I er ,
chap. a, 3, 4, 5, 0 el 7.