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                       CHARLES NODIER.                        63
       Elle élait bien jolie; et de pensers louchants,
       D'un espoir vain et doux chaque jour embellie,
       L'amour lui manquait seul pour être plus jolie !...
       — «Paix ! voilà son convoi qui passe dans les champs ! »

Ce qu'il y a de triste, c'est que venu après Werther et avant
Obermann et René, l'auteur des Méditations du cloître a
parlé sur le môme ton qu'eux, mais n'a point pris place à
côté d'eux; dlrai-je toute ma pensée? de Werther il a eu
l'accent; mais j'ai peur qu'il n'ait eu que cela. Etait-il aussi
profondément triste qu'il en a l'air, ne se faisait-il pas un
peu illusion sur sa douleur quand il disait :

   « El je plaignais Werther que j'aurais imité ! » Est-il bien
l'une de ces âmes vraiment désolées, toutes de douleur, dont
on ne peut sonder aucun recoin sans trouver de l'amertume
au fond ? Dans sa vieillesse, je le vois bien professer le dé-
sabusement de toutes choses, et le désabusement est cruel,
il est vrai, mais cruel à ceux-là seulement nourris de vastes
espérances et d'immenses désespoirs: le désenchantement est
encore une passion dans ces ames-là : il est la dernière. No-
dier, amoureux de l'entomologie, embellissant des inépuisa-
bles finesses de son style le canevas aride de la linguistique,
esprit un peu superficiel, vile malheureux et vite consolé, esl
surtout sceptique, un sceptique aimable, charmant, que le
scepticisme n'a point gâté dans ce que le cœur a de déli-
cat et de dévoué, mais trop volontiers détaché des problêmes
dont l'ignorance est le véritable tourment des âmes, pour
porter dans son sein une plaie bien profonde. Werther lui
 est à jamais venu en mémoire quand il écrivait, mais il n'y
 a réellement en lui rien de werlhérien ; ce souvenir le
 poursuit comme ces mélodies des grands maîtres parmi les-
 quelles une nous a frappé surtout, sans pour cela nous trans-
 former en Mozart ou en Beethoven. La preuve de ceci est