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240 HISTOIRE DE FRANCE. écrire qu'après M. de Sismondi, et M. de Sismondi lui-même n'au- rait pu classer tous les faits politiques de notre histoire sans la savante collection de D. Bouquet, les dissertations d'Adrien de Va- lois, et VArt de vérifier les dates. Montrer pour les recherches de pure érudition un superbe dédain, c'est donc faire preuve d'une présomptueuse ignorance. D'un autre côté, sait-on bien ce qu'on demande par l'histoire des peuples, au lieu de l'histoire des rois? Les nations n'agissent pas par elles-mêmes ; !»»urs progrès s'accomplissent par l'inter- médiaire des hommes qui leur servent de guides et dans lesquels elles se personnifient. Seulement les chefs des peuples ne sont pas toujours les rois ; les savants, les artistes, les poètes, les hom- mes d'étai, agissent souvent d'une manière plus efficace que ceux qui possèdent le pouvoir ep apparence, sans l'avoir en réalité. Par conséquent, l'histoire à la façon de Velly ou d'Anquetil est réelle- ment absurde, puisqu'elle suppose à tous les rois une autorité et une puissance qu'ils ont été souvent très éloignés et très incapables d'exercer. C'est de l'histoire monarchique, à la bonne heure ; mais de l'histoire fausse et conventionnelle. L'histoire, telle que l'ont comprise Machiavel et Montesquieu, est assurément bien plus pro- fonde et bien plus vraie. Mais elle ne convient qu'aux rares es- prits déjà préparés à saisir les résultats par la connaissance des détails. L'histoire réelle se tient dans un milieu entre ces deux excès en sens contraire ; elle n'explique pas seulement les grandes révolutions des états et les bouleversements dans la vie des sociétés par une intervention permanente de quelque force mystérieuse et surhumaine, méthode qui aboutit, en dernier résultat, à lajus- tiflcation de tous les faits ; mais elle saisit l'action de la Provi- dence se personnifiant dans de grands esprits qui lui servent d'a- gents et d'inlermédiaires pour guider l'humanité. A ce point de vue, la biographie acquiert de l'importance. Mais, d'un autre côté, ce n'est plus la biographie des rois que l'histoire entrepreud d'é- crire ; elle remet les choses et les hommes à leur place. Les archi- tectes qui ont élevé la cathédrale de Strasbourg ont une tout autre importance que les fiers Biirgmeislers qui purent gouverner Strasbourg au XIII e et au XIVe siècles; Michel-Ange est supérieur