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194                       LOUISE LABÉ.

aurait dû reconnaître en Louise Labé une supériorité de talent
que n'égalait aucun des beaux esprits de son siècle. Mais on
est forcé de voir, dans ce poète lui-même, une ame vulgaire
courant après les bénéfices et les fortes rétributions de son
mince talent bien plus qu'après les hautes inspirations de la
poésie et les bonnes fortunes qu'elles pouvaient entraîner.
   Toutefois, ce qui peint le mieux la position d'Ennemond
Perrin, c'est précisément cette pièce d'Olivier de Magny, que
les bibliographes joignent à l'édition de 1824 pour la com-
pléter. C'est ainsi que nous l'avons pu voir, dans l'exemplaire
que possède M. de Montmerqué. Sans apporter un témoi-
gnage décisif contre la réputation de celle que son amant
veut célébrer, cette pièce ébranle au moins les convictions
à cet égard. Telle est aujourd'hui la position d'une critique
consciencieuse qu'elle a au moins autant à réagir contre cer-
tains hommages dont la Belle Cordière fut l'objet que contre
les attaques passionnées dont les premiers sembleraient éta^
blir la preuve. Nous ne citerons qu'une strophe de cette ode li-
bellée principalement contre un homme dont le mérite m o -
deste, le dévouement naïf, méritaient beaucoup mieux. Les
détails circonstanciés qui y sont consignés sur les rapports de
Louise et de son mari, en les acceptant comme vrais, sont les
seuls motifs qui puissent nous engager à citer les vers qui sui-
vent, adressés à Ennemond Perrin :

         Tu peux bien cent fois en un jour
         Voir cette bouche faite au tour,
         Mais de fleurer jamais l'aleine
         Et l'ambre gris dont elle est pleine,
         Alléché de sa douce voix,
         En un an ce n'est qu'une fois.

Selon ce témoignage, le rôle d'Ennemond se serait borné à une
admiration muette et passionnée des charmes de l'esprit, de