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188                       LODISE LABÉ.

produit, non dans un refus de concourir soi-même à une
œuvre utile, mais dans un parfait désintéressement de l'es-
prit, dans celte complète abnégation qui sied à une femme
poète.
   Cette profession de foi,d'ailleurs, devrait, s'il en était encore
besoin, absoudre la Belle Cordière, de celle vénalité à elle
reprochée en si mauvais termes par les commentateurs ù
la suite, traduisant on ne sait quelle opinion, reconnue fausse
un peu plus lard.
   Ainsi l'on pourrait raconter, vers par vers, toute la vie de
cette femme avec la certitude de n'y trouver ni un sentiment
repréhensible, ni une pensée hostile à qui que ce fût. Elle
comprit toute la mission d'une femme et d'un poète. Elle
est dans ce mot de Jean Paul Richter : — « Moi, dit le poète,
j'adoucis. » Et les passions étaient alors fort vives, les guer-
res de religion étaient allumées, et il fallait beaucoup d'esprit,
beaucoup de savoir pour tenir le sceptre entre deux partis
toujours aux prises, deux croyances toujours prêtes à s'entre-
déchirer. — Elle, pendant qu'on se querellait au nom de
mille questions dont elle ignora toujours le premier mot,
faisait contraster Y Amour et la Folie, mettait ces deux rivaux
aux prises, les faisait se livrer à des luttes sanglantes, à un
combat acharné, et finissait par les accorder à condition que
la Folie servirait de guide à l'Amour, et depuis, dans le monde,
il n'en fut jamais autrement.
   Nous qui saisissons la lettre morte de son génie, nous ne
pouvons dire avoir connu tout à fait cette femme assurément
fort spirituelle, et douée, avant tout, d'un heureux génie, celui
de la gaîlé folâtre, d'un badinage élégant et fin, caustique
et ingénieux, celui de Marot; ne pouvons-nous pas nous
écrier à l'imitation du poète grec : Que serait-ce, si vous
l'aviez vue elle-même!
   Entrons, en effet, dans son salon ; il est vaste, il est splen-