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DE LA PHILOSOPHIE, ETC. 463 ment toutes choses en Dieu , de ne voir dans les créatures que des phénomènes de Dieu, jusqu'au point de ne voir partout que l'action directe et la substance propre de Dieu. En dehors de la philosophie proprement dite, dans la littéra- ture, dans les querelles théologiques du XVIF siècle, j'aper- çois encore celte même tendance à faire prédominer l'idée de Dieu sur l'idée de l'homme, je découvre toujours ce senti- ment profond du lien qui nous unit avec Dien. N'est-ce pas là un caractère commun à tous les grands écrivains du siècle , à Pascal, à Bossuet, à Fénelon? N'est-ce pas là le trait essen- tiel de Port-royal et du jansénisme? En effet, quelle est la tendance fondamentale du jansénisme qui lient une si grande place dans l'histoire littéraire et religieuse du XVIF siècle? N'est-elle pas d'anéantir l'action et la volonté humaine sous l'action et la volonté divine ? L'homme ne peut rien par lui- môme, il ne peut rien sans la grâce , pas môme demander la grâce; le juste qui succombe, comme le dit Arnauld, est un juste auquel la grâce a manqué, ou, en d'autres termes, nous ne sommes rien, nous ne pouvons rien qu'en Dieu et par Dieu. Tel est le principe défendu avec tant d'obstination et de courage par Port-royal, et vous voyez en quelle confor- mité il se trouve avec l'esprit de la métaphysique cartésienne. Ainsi, chez les penseurs du XVIF siècle, domine l'idée de Dieu, avec le sentiment profond de la dépendance de toutes les créatures en général et de l'homme en particulier. Il n'en n'est plus de même chez les penseurs du XV1IF siècle , ils écartent l'idée de Dieu, ils la mettent, pour ainsi dire, au second rang. Le XVIF siècle s'était tellement préoccupé de l'idée de Dieu, de l'idée du fini, qu'il avait plus ou moins perdu de vue la réalité du fini, la réalité de la personnalité et de la liberté humaine; en outre , il avait, comme si souvent il arrive , compromis cette idée dans ses applications à l'ordre social et politique. En effet, la plupart des écrivains et des