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246 LES FRÈRES massacrent sans pitié les blessés français, dispersent les moi- nes et laissent inhabitable la maison de Dieu. Vingt ans plus tard, ce monastère en ruines semblait en- core trop menaçant au pacha d'Acre, Abdallah, qui nourissait une haine profonde contre les chrétiens. Les Grecs venaient de se révolter. Abdallah écrit au Grand Seigneur que ces murs encore debout pourraient bien, un jour, servir de for- teresse à ses ennemis. Il lui demande l'autorisation de les détruire. Cette autorisation est accordée sans peine. Dans le même temps, le général de l'ordre des Carmes, à Rome, envoyait auCarmel un Frère, le Frère Jean-Baptiste Casini, architecte habile, qu'il chargeait d'examiner si le couvent pouvait être reconstruit. Le Frère part, et, à peine arrivé à Kaïfa, il entend l'explosion des mines et voit sauter en l'air les débris du monastère. Le Frère Jean-Baptisté pleura sur ces débris, comme au- trefois Jérémie avait pleuré sur Sion détruite. Sans doute, il s'écriait avec le grand prophète : « Comment cette contrée, naguère si peuplée, s'est-elle changée en une vaste solitude ? Les routes qui conduisent à ces murs sont en deuil.... 0 vous qui traversez ces lieux solitaires, voyez, et jugez s'il est une douleur comparable à la mienne.... Couvre-toi du cilice, répands la cendre sur ta tête ; pleure comme une mère qui a perdu son fils unique ; fais retentir l'air de les douloureux gémissements, car l'impitoyable dévastateur est venu > Mais, après avoir pleuré, le saint Frère entendit sans doute cette voix d'un autre grand prophète : « Le Sei- gneur dit : parle à ces ossements et dis-leur : Ossements arides, écoutez la parole du Seigneur : le Seigneur dit : Je vais vous animer de mon souffle et vous vivrez Que ton souffle parte des quatre points du monde, qu'il anime ces morts et qu'ils vivent Je rouvrirai vos tombeaux, je vous appellerai du fond de vos sépulcres ; car vous êtes