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I.ïi KOMAKCIIRO UU CID (l). La noble et valeureuse lierté de l'Espagne ne fïil jamais si bien représentée que dans la personne de son illustre guerroyeur, ce brave Dom Rodrigue, sur- nommé le Cid , et qui remplit de sa gloire le X I e siècle. Il fil plus à lui seul que beaucoup de rois pour agrandir et assurer sur ses bases le rojaiune de Castille, et il est resté dans les annales de sa pairie comme le type de cet honneur chevaleresque dont Cervantes a peint si largement les excès et la ruine. Des chantres inconnus ont fait de l'histoire du Cid une véritable épopée qui brille par des scènes animées, un langage pittoresque souvent empreint de cette énergie hispano-romaine (pie notre Corneille a mise dans ses poèmes. Ce sont assurément les romances espagnoles qui lui ont fourni les traits saillants de sa tragédie du Cid ; mais bien que la langue de la Péninsule prit alors faveur chez nous, il n'a pas tiré du Romancero tout ce qu'il aurait pu lui emprunter. Le Romancero du Cid est-il l'œuvre d'un seul poète ou de plusieurs ? Assez peu importe, et rien n'empêche, selon nous, que ces odes enchaînées les unes aux autres par une transition qui n'est point trop brusque, ne viennent d'une seule main. Ce qu'il y a d'incontestable, c'est que ces odes ou poèmes sont un curieux monument littéraire, qui n'a pas été assez étudié, faute d'une traduc- tion passable ou d'un texte plus répandu. Le travail que vient de faire à Lyon l'écrivain qui se cache sous le pseudonyme d'Antony Kcnal, comblera cette lacune ; et la précaution qu'il a eue de mettre le texte en regard de la ver- sion, facilitera mieux encore l'entente parfaite de l'épopée du Cid. La langue espagnole s'est formée des débris du latin, comme l'italien et le français ; le passage de diiférents peuples, notamment des Arabes, et le travail successif des âges y ont apporté beaucoup de mots étrangers ; mais le fond n'est autre que l'élément latin ou romain, et c'est ce qu'indique l'expression même de romance. Les odes qui ouvrent le Romancero du Cid sont d'une beauté remarquable et d'nn effet saisissant ; rien au-dessus de cela dans le reste du livre. Je citerais la première, mais en traduisant ligne pour ligne ces petits vers qui ont une allure tout-à -fait spéciale et difficile à rendre : Diego Lainez songeant A la tache de sa maison Noble, riche et antique, Plus que celle d'îgnigo et d'Abarca ; Et voyant que lui manquent Les forces pour se venger, ( i ) Lyon, imprimerie de 1>. Perrin, trad. nouvelle, avec le texte en îegard, par An tony RÉNAT,, 2 vol. in-8".