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plusieurs minutes avant de découvrir le roi au milieu de ce
nuage. — Les Suisses, ai-je besoin de le dire, professaient
pour la pipe un véritable culte. — La France seule, entourée
d'états décidément fumeurs, ne s'était pas, avant l'empire,
adonnée en masse à cet encens énergique ; il blessait les or-
ganes délicats de ses marquis efféminés; la caste quiavaitmis
à la mode la poudre à poudrer, le grasseyement, les mouches
et les talons rouges, recula devant le parfum des véritables
hommes; ceux que chérissent les femmes lui allaient mieux.
Et pourtant, jusqu'ici, quoi qu'en dise M. Montain, je n'ai
pu trouver dans la marche du tabac en France un temps de
recul ni d'arrêt. Les chiffres donnés par la Physiologie du Fu-
meur établissent, au contraire, une augmentation notableen sa
faveur. Pendant les orages de la Révolution, son usage ne di-
minua point ; en 1784< la ferme française payait pour lui seul
42,000,000 de francs au trésor, et gagnait encore. Dès la sup-
pression du monopole, des milliers de commis voyageurs s'a-
battirent sur les départements en concurrence, et y placèrent
par monceaux les produits de nos entrepôts. Aujourd'hui,
toutes les classes de la société contribuent à cet impôt réelle-
ment national, et l'état en retire 90,000,000 de francs (L),
sans compter la valeur de la contrebande. Que conclure de
 ces faits, si non que le tabac a surmonté tout esprit d'opposi-
 tion et de mode; qu'il est devenu un objet de première né-


   (L) Je ne sais comment m'y prendre pour adopter cette opinion
des 90,000,000 d'impôt national. Ceci me rappelle qu'un écrivain
distingué ayant fait mine d'écrire contre l'impôt du tabac fut appelé
par le gouvernement d'alors à la direction de cet impôt, et qu'un
autre qui écrivit pour l'usage eut également part aux faveurs de ce
gouvernement. Certes, nous n'avons, ni l'un ni l'autre, des préten-
tions pareilles.
                                                    G. M.