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    Pourquoi cette différence ? pourquoi cette estime exagérée
des méthodes d'enseignement, et cette insouciance irréfléchie
des principes éducateurs ? Cela tient, sans doute, à cette dis-
position un peu frivole de l'opinion qui se prend à la forme
extérieure plutôt qu'à la valeur intrinsèque, aux faits plutôt
 qu'aux idées, à l'action plutôt qu'à la théorie qui la déter-
 mine. Le dirai-je aussi, Messieurs, c'est un des caractères de
notre époque plus active encore que philosophique, de se
 préoccuper médiocrement des grands intérêts de la pensée et
de l'ame, et beaucoup des choses de la vie pratique. A mesure
 que la foi et le sentiment moral diminuent d'importance, on
voit s'augmenter en proportiou l'estime des réalités positives.
 Alors la civilisation se mesure aux progrès de l'industrie, aux
améliorations matérielles, aux perfectionnements mécani-
 ques de l'art, des gouvernements et de la mode. En politique
ce qui passionne les esprits et ce qui les divise, ce ne sont pas
les grandes questions sociales de mœurs et de croyances, mais
les disputes infimes sur les personnes et les formes du pou-
voir ; en littérature il s'agit bien moins de large inspiration
et de haute moralité, que des futiles controverses de style ou
d'école. Est-il étonnant qu'en matière d'éducation, il se ma-
nifeste dans l'opinion un désordre analogue? Il semble, en
effet, Messieurs, qu'on attache une importance extrême aux
méthodes , aux classifications, à la partie instrumentale de
l'enseignement, et qu'on ne s'occupe pas assez des principes,
du point de vue moral, des pensées dominantes qui doivent
pénétrer l'ame des instituteurs et gouverner l'ensemble de
l'éducation. Aberration funeste qui frappe de stérilité les
tentatives de réforme les plus ingénieuses et les mieux inten-
tionnées ! Qu'importe, en effet, de perfectionner le méca-
nisme , si le principe moteur manque d'énergie ou d'appro-
priation ? qu'importent les formes les plus savantes et les
mieux combinées, si le fonds môme est vicieux et impuissant ?