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Dont l'homme d'aujourd'hui ne fasse une denrée,
Qui se délivre au plus offrant.
La gloire, le pouvoir, l'honneur sont aux enchères ;
Les rois vendent la royauté,
Les nobles leurs blasons, les soldats leurs bannières,
Les nations leur liberté.
Au démon de l'argent on signe un pacte à vie,
On met son ame pour enjeu :
La femme vend son cœur, l'artiste son génie,
Et le pontife vend son Dieu!
Le sceptre est monnoyé; nos seigneurs portent l'aune,
Tyrans plus vils et plus méchants;
La bêtise opulente accapare le trône,
Les rois ont fait place aux marchands !
Le peuple aux usuriers a, pour quelques centimes,
Cédé l'héritage des rois,
Et quand il n'a pas faim, sans désirs plus sublimes,
Il dort tranquille sur ses droits !
Et les vendeurs sont là ; palais, chaires, portiques,
Temples sont par eux envahis.
Ils rognent à leur gré les contrats politiques
Et les frontières des pays;
En deniers, sous leurs doigts, tout se métamorphose :
Art, prière, amour, équité;
Ils trafiquent du mot et détruisent la chose;
Le mensonge est leur vérité !