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325 Les Russes qui, brisés contre leur mur d'airain, De funèbres monceaux jalonnent le terrain ! Sous le rapide feu de chaque batterie S'avance pesamment leur lourde infanterie, Dont les soldats massifs, par la mort séparés, Resserrent à l'instant leurs bataillons carrés, Comme on voit une mer que l'orage tourmente. Ouvrir et refermer une gueule écumante. Là tous, sans avancer, sans reculer d'un pas, Dans un calme héroïque attendent le trépas ; Si quelque mouvement ébranle leur phalange, Ce n'est que pour tomber, quand la mort les dérange. Un carnage si lent dans sa sublime horreur De nos fougueux guerriers irrite la fureur. Leur courage enhardi par un seul coup espère Achever la victoire et peut-être la guerre, Si la garde avec eux vers Mojaisk descend Refouler de vaincus un reste menaçant. La garde ! qu'elle vienne. ! à grands cris on l'appelle ; Mais l'armée est réduite à triompher sans elle, Oh ! que d'exploits rivaux illustrent tour à tour Ce combat de géants qui dure tout un jour ! Quel ardeur d'héroïsme, ô Français ! vous anime ; Depuis l'obscur soldat jusqu'à ce chef sublime Qui, du sang ennemi de nouveau baptisé, Aux champs de Moskowa prince immortalisé, Se fait, pour enrichir son blason militaire, Du nom d'une bataille un nom héréditaire !