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quemment toujours dans le vrai. Ils savent s'isoler tout-à-fait
lorsqu'ils sont en s c è n e , et paraissent ne pas s'apercevoir
qu'on les regarde. L e public lui-même peut se croire le témoin
indiscret de leurs jeux auxquels ils semblent se livrer bien
plus pour eux que pour le spectateur.
   C'est sans doute ce naturel et cette vérité d'expression qui ont
 valu à M. Camprubi et à Mlle Dolores Serai plusieurs récrimi-
 nations lancées par des personnes d'une pruderie bien sévère.
Mais une telle critique tombe impuissante avant d'atteindre,
autrement ne serait-ce pas reprocher à un artiste de rendre la
grâce par trop de grâce , l'amour par trop d'amour, la passion
par trop de passion !
   M. Camprubi et MIIe Dolores ont exécuté successivement Vel
jaleo dejeres , le pas styrien, la cachucha et la danse aragonaise.
 Toutes ces danses sont empreintes du cachetde la molle Espa-
gne , mais le pas styrien est, sans contredit, celle qui mérite le
plus d'éloges. 11 est impossible de rien voir d'aussi gracieux,
d'aussi délirant ; on a peine à concevoir autant de souplesse
dans les muscles , autant de grâce dans ces nœuds qui se for-
m e n t , se resserrent et se multiplient comme les anneaux flexi-
bles d'une chaîne sans fin.
  Après c e l a , si l'on nous demande ce que peuvent gagner les
mœurs à de tels spectacles, nous répondrons : que si l'on inter-
disait chez nous la danse espagnole, il faudrait supprimer
aussi la danse de nos théâtres, car cette dernière est encore
plus corruptrice que l'autre.
                                        STANISLAS CLERC,