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151 avide d'entendre une parole amie. Aucune voix ne lui est con- nue. Aucun voile blanc ne s'agite pour lui dire adieu!!! adieu à lui qui va mourir! ! ! ! Oh ! que la mort lui paraît hideuse dans ce cruel abandon. Sentant son courage faiblir, il s'avançait vers le fatal poteau pour en finir plus vite avec celte affreuse torture de son ame, lorsqu'une voix forte et émue s'élève au- dessus de la foule et appelle : André !.... 11 se retourne, en tre- saillant, et aperçoit sur un tertre un peu élevé un homme, son ancien compagnon de voyages, qui agitait son mouchoir en l'air en signe d'adieu. A côté de lui une jeune fille belle, mais d'une pâleur livide était appuyée tremblante contre une ro- che. André la reconnut à sa jupe blanche , au madras rouge qui lui entourait la tête, à sa chevelure de créole qui s'échap- pait en longues tresses sur ses épaules. Il la contempla quel- que temps , et sa force sembla renaître. Elle pleurait, elle , pauvre jeune fille ! pour avoir donné tout son amour à cet homme qui n'avait plus le droit de vivre ; pour avoir attaché tout son être à cet être que l'on allait briser violemment! ! ! ! Adieu! cria tout-à -coup André en lui tendant les bras, adieu ! prends courage, on se retrouve au ciel ! ! ! ! Il le croyait l u i , car il aimait ! ! ! ! Thome , continua-t-il, souviens-toi de la dernière recommandation de ton ami, veille sur elle et Dieu te bénira! ! ! et, ne pouvant plus maîtriser son émotion, il s'é- lança vers la fa Laie échelle. A peine domine-t-il la foule qu'un cri déchirant se fait entendre ! ! ! ! La jeune fille venait de s'é- vanouir , et Thome la prenant dans ses bras, fuyait cette scène de désolation. André les vit partir, et parut plus calme. Quel courage pour aimer ainsi et ne pas blasphémer le ciel et la terre ! !! ! Les échelles se dressaient ; quelques coups de marteau re- tentirent et nos âmes tremblèrent. L'heure allait sonner. La voix de l'exécuteur se fit entendre. Les corsaires se réunirent par un mouvement spontané , et s'embrassèrent comme des frères ; n'élaient-ils pas les fils d'une même destinée ?.... Puis