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117 quelle manière on comprend la musique sacrée dans notre bonne ville et quels encouragements on prétend donner aux artistes qui voudraient tenter à ce sujet une réforme si dési- rable; je la raconte sans fiel et sans vouloir faire de récri- mination. Il y a environ un an , le directeur de la musique d'une de nos riches paroisses vint chez un de mes amis qui se dispo- sait à partir pour Paris, et lui fit promettre d'écrire spécia- lement pour sa société quelques morceaux de musique sa- crée ; son travail et sa peine seraient, dit-il, récompensés; aucun salaire ne fut donc déterminé. Arrivé à Paris, le jeune compositeur chercha quelques mo- dèles du genre religieux ; il consulta Mozart, Paleslrina, Benedetto Marcello ; ce dernier lui fournit un gracieux mo- tif, il paraphrasa cette pensée, et écrivit sous l'influence de ce maître trois partitions ; l'une d'elles fut, je crois, exécu- tée ; mais , avant de livrer les deux autres, un des amis de l'auteur voulut prendre ses intérêts, et demanda quelles étaient les intentions de la société à cet égard... Je vous le donne en cent, en mille, si vous voulez... Jamais vous ne devinerez le prix auquel on taxa ses quinze jours de travail; vraiment je ne puis encore y penser sans rire de ce rire inex- tinguible dont parle Homère... On offrit quatre francs... qua- tre francs!.. Que si quelque ame honnête prétendait que cela n'est pas possible, et qu'à coup sûr je suis mal informé, je n'aurais qu'un mot à répondre, c'est que le musicien dont il est ici question, c'est moi... Au fond, tout cela ne prouve qu'une chose , ou la médio- crité désespérante de ma musique > ou bien une bonhomie charmante dans l'appréciation de mon Å“uvre. Quelques écrivains, plus experts que moi, ont écrit longue- ment sur la musique, et ont démontré avec évidence qu'elle influait d'une heureuse manière sur les mÅ“urs du peuple. En adoplant celte idée comme une vérité incontestable, que nous reste-t-il à désirer, si ce n'est de voir le goût de lÃ