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306 A« même instant on amena devant l'empereur le lom- bard Alori, désarmé, presque nu, tout souillé de la fange d'un fossé boueux dans lequel il s'était caché pendant la fin du combat. —T- Eh vite! eh vite! s'écria Roland à sa vue, mes chiens et mon destrier, car j'ai -vu une bête fauve. Pour- suivons ce pauvre lièvre, ce daim timide, cette biche tremblante par les bois , par les p r é s , par les monts. Boland est approuvé aussitôt par les cris d'une joie fé- roce ; et les chiens sont lancés sur la piste d'Alori, mar- quis de Mantoue. Mais il avait entendu les cruelles paroles de Roland, et, ramassant à terre un des nombreux jave- lots dont le champ de bataille était jonché, le désespoir, la honte , l'opprobre d'une mort effroyable lui donnèrent assez de cœur pour se tuer. L'impitoyable paladin, irrité d'avoir été prévenu, fit pendre le cadavre par les pieds à l'arbre le plus voisin. Puis il revint auprès de Charlema- gne qui fit à son neveu des reproches amicaux pour avoir aussi follement interrompu sa cour plénière. Lorsque Charlemagne eut fait réunir, aux pieds de son trône, le riche butin enlevé aux mécréants, il ordonna, avec le consentement des barons, qu'avant de faire les parts, Oger prendrait tout ce qu'il voudrait, comme étrennes de sa noble victoire. L'enfant Oger fit quelques pas vers un grand monceau d'or que nos Français regardaient avec des yeux étince- lants de joie et de cupidité. Mais en se dirigeant vers le métal brillant, l'enfant Oger passa près d'une jeune cap- tive. Il fixa sur elle ses yeux d'épervier; en ce moment amour et plaisance lui entrèrent au cœur. D'abord il ne put point parler ; car il sentait son aine se fondre. •—Voici ma part, dit-il enfin, et tout ce que je veux du butin.