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296 Francs, ne perdons point notre journée dans ces plaids inutiles. Allons, qu'un grand festin nous consolé de la félonie des Danois. Quant à ce jeune muet, qu'on le mène à la mort. Telle est la misérable condition des otages, qu'ils sont punis pour le crime dont, de tout leur lignage, ils sont le plus innocents. Si nous changions cette loi une seule fois, tous les vaincus nous trahiraient sans cesse. D'ailleurs il ne faut pas nourrir ce jeune loup pour qu'un jour il dévore nos enfants. Pour qu'aucun de mes vassaux ne soit jamais tenté de me trahir, je veux que toute l'ar- mée chrétienne soit convoquée à ce spectacle. L'enfant Oger, n'ayant plus d'espérance, leva les yeux vers le ciel pour y chercher sa mère et son Dieu, et se retira sans mot dire. Cinq pautonniers emmènent Oger, et le conduisent au lieu du supplice. Le bon archevêque Turpin l'accompagne pour le consoler et le préparer à la mort, et pour essayer en même temps de retarder par tous les moyens l'instant fatal. Il espérait qu'en remettant cette mort d'un jour seulement, la colère impériale serait peut-être calmée. Il arrêta si bien et si long-temps l'enfant Oger devant toutes les églises, toutes les chapelles, pour y prier avec lui, qu'ils arrivèrent, à la nuit noire, au pied de la tour la plus haute. Alors le bon archevêque fit remettre le supplice au lendemain; car Charlemagne avait ordonné que toute l'armée vît mourir l'enfant Oger, et la nuit était trop obscure pour que cela fût possible. Ensuite il revint près de l'empereur, et le supplia de nouveau. Mais l'empereur, plus irrité que jamais, ordonna la mort d'Oger pour le lendemain aux premières lueurs de l'aurore. Turpin cher- cha, mais en vain, de nouveaux prétextes pour retarder encore l'exécution des ordres impérieux et barbares, tout