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la fatalité , qui se reproduisit encore plus tard , par laquelle
j'étais sans cesse ramené auprès de quelque c o m p a t r i o t e ,
moi qui avais besoin pour être tranquille, de garder le plus
strict incognito. Il me suffit d'entendre nommer M. Riboud ,
si je m'en souviens b i e n , président du conseil des Prud'hom-
mes à Lyon , et de causer avec lui pendant cinq minutes, pour
être bien convaincu que nous avions encore trouvé dans nos
compagnons de voyage des adversaires politiques si bien dé-
cidés qu'il était inutile d'entamer avec eux aucune discussion.
Nous évitâmes donc toute parole qui pouvait déceler nos opi-
nions. Aussi, pendant les journées du voyage et celles de
leur séjour à Zurich, nous fûmes au mieux avec mes compa-
triotes. En eût-il été de même s'ils eussent connu nos véri-
tables noms? Qu'ils m'excusent, si je me p e r m e t s , à tort
p e u t - ê t r e , d'en conserver le doute ! Puissent-ils, en tous cas ,
 si ces lignes parviennent sous les yeux de quelqu'un d'eux,
 demeurer persuadés, en se rappelant leur v o y a g e , de la juste
 nécessité de la tolérance politique!...
   Le galop des chevaux n'était pas assez précipité au gré de
 notre impatience. Enfin , tout l'espace qui nous séparait de
 Zurich s'épuisa; dans la matinée du troisième jour, nous aper-
 çûmes les fortifications dont cette ville est entourée. Nous
 suivîmes quelque temps les fossés et bientôt parût un p o n t ,
 puis une large ouverture qui donnait accès dans la cité. Mais
 cette ouverture présentait des traces récentes de démolition.
Il n'y avait point de portes ; les murailles étaient entamées ;
le sol était couvert de débris. Nous comprîmes que ce devait
être là quelqu'œuvre de dictature populaire. En effet, nous
 sûmes plus tard qu'à leur arrivée à Zurich, les carabiniers,
voulant vider enfin cette question depuis long-temps débat-
tue : < la ville conservera-t-elle ou non son enceinte fortifiée? »
        t
n'avaientrien vu de mieux à faire que d'aller, à priori, démo-
lir les tourelles et les ponts-levis qui défendaient les portes.
Ce début annonçait en eux une vigueur de résolution qui
devait se promettre plus d'un autre résultat.