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375 Je voudrais indiquer l'influence plus générale du bon ordre qui devra présider à ces Archives et ce que la mise en œuvre des richesses dont elles se composent pourrait apporter d'utilité, soit à l'histoire, soit à la statistique. Et d'abord que l'on me p e r - mette quelques réflexions sur la disposition des esprits de notre époque pour l'étude du moyen âge de la France. Depuis ce qu'on appelle le renouvellement des lumières en Occident, les littérateurs et les artistes ont presque tous cherché leurs modèles dans l'antiquité classique, en Grèce ou à Rome. Une réaction qui date de quelques années se fait sentir mainte- liant contre celte préoccupation exclusive des quatre siècles qui précèdent le nôtre. On se rendra peut-être facilement raison de ces faits si l'on se rappelle qu'au milieu du siècle dernier les philosophes qui conçurent l'Encyclopédie, eurent pour but d'é- lever un monument qui constalerait le degré de perfectibilité où étaient parvenus les sociétés européennes et qui devait surtout leur faciliter de nouveaux progrès. En dressant ce bilan du passé ils eurent donc principalement en vue la destruction des institu- tions présentes qui gênaientla marche de l'esprit humain. Aussi la période qui contient ces institutions depuis leur naissance jusqu'à leur plus haut développement, leur parut-elle une lacune qui avait rompu le fil de la civilisation^ une époque de fatalité et de barbarie indigne d'un examen approfondi. Un siècle se sera bientôt écoulé depuis que ces philosophes ont achevé l'œuvre dont on a vu la tendance et qui nous sépare à jamais de ces insti- tutions, objets de leur mépris et de leur haine. Maintenant donc nous pouvons juger de sang-froid ce qu'on appelle le moyen-âge. Eu parler avec impartialité ne serait pas un mérite suffisant ; mais n'en parler que d'après une étude consciencieuse est plus que jamais un devoir. L'avidité de noire époque à connaître tout ce qui tient au moyen-âge s'explique naturellement par ce qui précède : c'est un sentiment secret mais j u s t e , qui nous avertit que quatorze siècles dans les soixante dont se compose l'histoire du genre h u m a i n , doivent fixer au moins quelques moments notre atten- tion. Il ne faut pas s'étonner s'il n'est guère de productions nou- velles, drames ou r o m a n s , poésies ou beaux-arts, qui ne t e n -