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Causerie. Lyon, le 7 avril.

L'aéronaute français qui vient de s'embarquer pour l'Alaska, avec le ballon grâce auquel il se propose de ravitailler les chercheurs d'or du Klondyke, est un homme de la forte trempe d'Andrée. De ce dernier, parti en ballon pour le pôle Nord, on est encore sans nouvelles. Le mois prochain nous en recevrons de notre vaillant compatriote et de son aérostat.

Cette nouvelle entreprise est pleine de périls. Il s'agit de guetter les courants aériens et de se confier à eux dans un ballon à la nacelle chargée de vivres. En cas d'accident, aucun secours à espérer dans une région déserte et glacée, dans des terres de désolation et de mort.

Nous suivrons avec intérêt cette tentative héroïque.

Rappelons, à ce propos, que les entreprises aérostatiques sont, par tradition, d'inspiration française.

Non seulement l'invention du ballon, vaguement esquissée eu Portugal, est due aux frères Montgolfier, d'Annonay ; mais les plus audacieuses expériences aériennes furent faites par des Français. Depuis Pilâtre de Rozier et le baron d'Arlandes exécutant le premier voyage aérien, ce sont des Français qui ont tenté avec le plus d'intrépidité la conquête des airs. Après Charles et Robert, qui firent un voyage de dix lieues sous un ballon gonflé de gaz hydrogène, après Blanchardqui traversa la Manche, combien de Français ont offert leur vie pour hâter la solution du problème non encore résolu de la direction des ballons !

Guiton de Morveaux, Meusnier, Transon, Delcourt, Petin, Giffard, Nadar, Dupuy-de-Lôme, Tissandier, et bien d'autres que j'oublie, ont cherché, d'après des données diverses, la direction des aérostats.

N'oublions pas non plus que l'honneur appartient à la France d'avoir inauguré l'aérostation militaire et d'avoir obtenu, en fait de direction, le premier résultat certain. En 1884, MM. Renard et Krebbs, partis dans leur aérostat à hélice électrique des ateliers militaires de Meudon, revinrent atterrir à leur point de départ, après avoir décrit dans les airs une boucle allongée de huit kilomètres.

A noter encore ce point intéressant : les nations étrangères soucieuses de ne pas se laisser distancer par nous, s'engagèrent dans l'étude de l'aérostation militaire, mais elles se virent contraintes de s'adresser à des constructeurs français pour l'installation de leurs parcs.

La Russie, le Danemark, le Portugal, la Roumanie, se sont adressés pour cela à MM. Gabriel Yon, Godard, Surcouf, Courty, Lachambre et à quelques autres. Mais le matériel aéronautique français reste de beaucoup le meilleur.

Il n'est peut-être pas inutile do rappeler de temps en temps que la Franco a d'autres supériorités que celle de sos cuisiniers et de ses coiffeurs, — sans dédaigner, certes, ces dernières.

Je n'ai pu lire sans un douloureux serrement de coeur l'histoire de ce pauvre enfant de onze ans allant prier un commissaire de police de vouloir bien lui faire la faveur de le mettre en prison...

Quel mal as-tu fait? lui a demande le magistrat. Je n'ai fait aucun mal, monsieur. Pourquoi veux-tu, alors, qu'on te punisse ? Monsieur, ma pauvre maman est morte il y a deux mois. J'habite seul avec papa qui rentre ivre tous les soirs, au point de ne pas même me reconnaître. Il me bat tant qu'il peut... Voyez, je suis tout couvert de bleus... Ça fait que j'aime mieux aller en prison que de continuer cette vie-là...

Le petit infortuné sera confié à la Société de Protection de l'Enfance abandonnée, qui le détournera de la voie mauvaise où, faute de direction et à force de souffrances, il aurait, pu finir par s'engager.

On évalue à plus de soixante mille les enfants abandonnés qui errent dans toute la France, sollicités par le mal. Ce sont là pour la plupart, de futures recrues de l'année du crime. L'oeuvre de Protection s'empare d'un certain nombre d'entre eux, les relève et les sauve, en en faisant d'honnêtes travailleurs qu'elle place, autant que possible, dans les exploitations agricoles.

Il est malheureusement avéré que certains enfants, empoisonnés par une hérédité funeste, ont reçu en naissant l'indestructible germe du mal ; mais c'est le plus petit nombre parmi les jeunes abandonnés.

Dans les créatures les plus perverties, il reste presque toujours, dissimulées en un petit recoin du coeur, quelques graines de la fleur du bien.

Il s'agit de les découvrir et de les faire germer. C'est une oeuvre qui exige des trésors de délicatesse, de constance et de bonté ; mais ceux qui parviennent à la mener à terme, sont magnifiquement récompensés par la satisfaction d'avoir accompli une des plus belles actions humaines.

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