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    Causerie

    Tout est contraste sur cette terre. Tandis que les deux grandes nations qui sont aux prises en Extrême-Orient s'appliquent énergiquement à s'exterminer, de braves gens s'occupent, d'un autre côté, avec un zèle très méritoire, d'améliorer la race future.

    A Leeds, en Angleterre, un grand concours va prochainement s'ouvrir à cet effet, par les soins d'une société qui s'est donné pour but l'encouragement de la culture et de la santé physiques. Des prix de valeur seront attribués aux concurrents des deux sexes, aux hommes dont le corps, aux proportions régulières, rappellera le mieux les plus purs modèles de la statuaire antique, aux femmes d'une beauté harmonieuse et sévère, qui joindront la plus grande perfection de traits à la plus impeccable plastique.

    La Société espère que de nombreuses unions matrimoniales entre les lauréats, favorisées par la remise de sommes importantes, suivront ces concours, et qu'on arrivera ainsi à perpétuer ces formes de beauté et celle noblesse d'attitude dont, si justement, s'enorgueillissait la vieille Grèce.

    Il reste seulement à savoir si les types dignes de rivaliser avec l'Apollon du Belvédère ou la Vénus de Milo seront bien nombreux; mais toujours est-il que les organisateurs du concours se montrent très confiants, ce qui ne laisse pas que d'être très flatteur pour la plastique de nos excellents voisins et de nos aimables voisines du Royaume-Uni.

    Ce sera tout de même un peu shocking, les conditions du concours portant que les hommes devront se présenter sans le moindre maillot devant le jury, et que les femmes n'auront droit qu'à cinq mètres de mousseline pour draper leurs charmes. Mais on est très patriote en Angleterre, et du moment qu'il y va de l'avenir du pays !... Enfin, on verra bien ce qu'il en adviendra.

    En attendant, un cri d'alarme arrive d'Australie, annonçant une diminution aussi rapide qu'inattendue de la natalité dans la grande colonie anglaise. Une commission d'enquête a été nommée, qui, jusqu'à présent, n'a pu que constater le mal, sans y trouver de remède, pas plus d'ailleurs qu'on n'en a trouvé en France, ni M. Piot ni d'autres.

    A propos de remède, on vient de découvrir une maladie nouvelle qui exerce de sérieux ravages sur notre pauvre humanité. On dit communément qu'il n'y a pas de nouvelles maladies, qu'il n 'y a que de nouvelles dénominations. Eh bien, il parait qu'on a tort, du moins dans le cas présent, le mal en question étant dû aux conditions particulières de la vie moderne. îl a même un nom assez réussi. Avez-vous assez remarqué à quel point les médecins excellent à décorer de jolis noms les pires affections ? Et la cirrhose par-ci, et l'amaurose par-là, et les névroses ! De quoi nous faire, en un mot, voir tout en rose, même les plus fâcheuses maladies.

    Celle dont je veux parler, puisqu'il faut appeler par son nom cette nouvelle peste, a été baptisée : mal de terre , par opposition au mal de mer; mais elle est autrement grave.

    Le mal de terre est on ne peut plus moderne; nous le devons aux longs voyages en chemin de fer ou en automobiles, et il se manifeste d'ordinaire par un accablement qui provoque un sommeil invincible.

    Gardez-vous de ces longs voyages, nous dit une revue médicale des plus autorisées, qui insiste sur leurs inconvénients au point de vue hygiénique. Elle fait également remarquer qu'ils sont très souvent cause de surexcitation cérébrale, surtout si le voyageur regarde d'une manière continue le défilé vertigineux des arbres, poteaux de télégraphe, etc.

    Ainsi donc, cette fréquence et cette rapidité des voyages auxquelles nous nous complaisons sont éminemment défavorables à. notre santé; nous allons trop vite et trop loin et nous nous surmenons, sans cesse en proie aux excitations d'une vie fiévreuse et agitée.

    Mais le moyen de faire autrement, de revenir à l'antique patache ! Il faut aller aux vitesses accélérées des express et des rapides, dût notre pauvre carcasse en souffrir. Vertige de la vitesse, mal de terre, c'est le mal de l'époque, et nous avons beau être mis en garde contre lui, être avisés de ses inconvénients et de ses dangers, ni vous ni moi ne ferons probablement rien pour éviter d'en subir les atteintes.

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