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    Causerie. Lyon, 25 octobre.

    J'écris ces quelques lignes à la hâte, le soir de la fête magique que la seconde ville de France vient d'offrir aux marins russes. Lyon a été fidèle à sa belle devise : En avant Lyon le meilhor ! fidèle à ses fières traditions de cité patriote, toujours prête pour les nobles manifestations.

    Ah ! la radieuse journée ! Après les ovations et les féeries de l'hospitalité parisienne, nos hôtes se sont dit apparemment qu'ils ne verraient jamais plus rien de pareil... Lyon, cependant, a su égaler Paris. L'amiral Avellan et ses officiers ont retrouvé ici des réjouissances et des spectacles publics aussi superbement ordonnés et les mêmes foules respectueuses et enthousiastes.

    Les réceptions officielles ont été ce qu'elles sont toujours : correctes, bien réglées, et d'une majesté pour ainsi dire connue par avance. Mais ce qui fut incomparable et inoubliable, c'est la fête démocratique sous la coupole de l'Exposition, où trente mille citoyens ont salué triomphalement les représentants de la Russie ; c'est l'élan chaleureux, l'acclamation unanime de toute la population de Lyon et des départements voisins, témoignant ainsi que le peuple français a ratifié sans réserve l'amitié conclue entre les deux gouvernements.

    Nous avons vu aujourd'hui, réalisée dans les coeurs et vraiment vivante, l'alliance indissoluble et fraternelle de la France et de la Russie. Et nous sentions tous planer, au-dessus des drapeaux frissonnants et des vivats, la sainte image de la Patrie.

    Certes, c'est un grand peuple celui qui sait donner de tels spectacles. Les marins russes sauront le dire au czar. Et pour inspirer à leur souverain les sentiments d'admiration et de cordialité qu'ils ressentent, ils n'auront qu'à raconter simplement ce qu'ils ont vu: toute une grande nation réunie dans une suprême pensée de patriotisme et sachant la traduire par la plus magnifique altitude.

    Toulon, Paris et Lyon ont parlé pour la France entière le digne langage qui convenait. Le monde l'aura entendu et compris. La semaine qui vient de s'écouler sera désormais une semaine historique. Si la paix peut être maintenue longtemps encore en Europe, les événements de ces derniers huit jours n'y auront pas peu contribué. Et si, par malheur, il en était autrement, la Triple Alliance sait qu'elle trouvera devant elle la Russie et la France.

    Voilà pourquoi je termine, moi aussi, cet article improvisé par le cri qu'ont poussé aujourd'hui cinq cent mille poitrines : Vive la Russie ! Vive la France!

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