Au concours hippique
Il a été très réussi, cette année, le Concours hippique de Lyon. Les chevaux présentés ont été plus nombreux que jamais, et l'on a pu voir qu'ils étaient généralement montés d'une façon supérieure. Nos officiers sont en constants progrès, et c'est plaisir de les voir franchir, avec une calme assurance, les obstacles dont la piste est hérissée.
Les Lyonnais n'ont pas fait défaut à ces intéressantes réunions. Le beau temps aidant, ils les ont suivies avec un très vif empressement qui témoigne du grand intérêt qu'ils portent aux choses militaires. Au surplus, l'armée d'aujourd'hui et la nation ne font qu'un. Tous ces braves pékins qu'on a vus massés le long des barrières sont les soldats d'hier ou de demain ; ils ne pouvaient manquer d'aller suivre les brillantes évolutions de nos cavaliers, considérées bien à tort, jadis, comme de vaines parades. L'élément civil a fait également bonne figure dans le Concours hippique. Voyez ce mail-coach correctement attelé à quatre. Le cocher-paraît tout fier de mener un aussi fringant attelage.
Et cet autre, qui du siège étroit de son léger tilbury, fait arpenterla piste à son rapide trotteur d'une si belle allure ! Allons, Cocotte ! Et surtout n'accrochons pas. Allons ! encore un tour, et le prix sera pour nous.
Quatre heures sonnent. Les palefreniers amènent en toute hâte les chevaux qui vont être montés sur la piste; un coup de cloche, et les éprouves des gentlemen commencent.
Une dernière recommandation d'abord. C'est le gros propriétaire, dont l'élevage est réputé dans toute la région, qui l'adresse au cavalier à qui il a confié la monte d'un de ses meilleurs produits.
Bravo l'Habit Rouge! De flatteurs applaudissements retentissent dans la tribune des fondateurs. Les obstacles ne sont qu'un jeu pour ce gentleman, encore que, sa bête soit un peu ombrageuse.
Les commissaires, le militaire et le civil, apprécient en fins connaisseurs cette monte savante. Mais voici que le tableau change. Un autre Habit Rouge est apparu, tout rutilant. Lui aussi il a escompté les applaudissements et les gracieux sourires. Comme tous les spectateurs, les hommes de manège suivent attentivement le parcours.
Très bien, le saut de la haie ; très bien, la barre et le mur. A la rivière, maintenant. Crac ! voilà que ça glisse, et l'infortuné cavalier fait un beau plongeon.
Il n'y a pas de mal. L'Habit Rouge s'est relevé aussi prestement que possible, il a rattrapé son cheval par la bride. Mais que de tristes réflexions l'assaillent tandis qu il se baisse pour ramasser son chapeau ! 11 est bien aise, au fond, de s'en tirer à si bon compte ; mais comme une chute sans accident est toujours un peu ridicule, il aimerait presque autant, en ce moment, pénible où tous les regards sont braqués sur lui, être resté étourdi sur l'arène. Au moins, dans ce cas, tandis que son cheval, livré à lui-même, galoperait follement à travers l'arène, les gouailleries qu'il devine se changeraient en d'unanimes sympathies.
Bah ! 11 prendra demain une éclatante revanche. Tels sont les multiples incidents auxquels donnent lieu chaque jour les intéressantes réunions que le « Tout Lyon » vient de suivre à l'hippodrome du Cours du Midi.
